Ces PME familiales qui se réinventent au fil du temps

Si l’essor du numérique dans l’économie concentre l'attention sur les jeunes pousses de ce secteur, la France regorge aussi d'entreprises familiales et centenaires, qui ont su prospérer.

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L’ancienneté d’une marque est souvent considérée comme gage de qualité pour le public. Selon le label des entreprises familiales centenaires (EFC), de plus en plus d’entreprises utilisent d’ailleurs les préfixes « depuis », ou « créé en », suivis d’une date, car « la moitié au moins des clients se disent intéressés par l’histoire de la marque ».

Preuve en est : en 2017, quelque 400 marques contenant un terme relatif à l’ancienneté ont été déposées à l’INPI (Institut national de la propriété industrielle). Sans compter les 7 300 marques « anciennes » qui existent déjà en France.

Un poids économique certain

Au-delà des marques, selon le label EFC, la France réunit 1 450 PME « anciennes » (hors vins et spiritueux), ayant plus d’un siècle d’existence et dont le capital est détenu par la même famille. Elles cumulent 25 milliards d’euros de chiffre d’affaires et emploient environ 120 000 personnes.

Le label EFC nous apprend également que 50 % des PME familiales centenaires génèrent moins de 5 millions d'euros de revenus, 66 % moins de 10 millions d'euros, et seuls 5 % atteignent les 100 millions.

Certaines de ces entreprises battent même des records de longévité. C'est le cas de Château d'Arlay, un domaine viticole familial créé en 1070, selon les archives conservées au château. Moins loin dans le temps, en 1622, Baptiste Guignan s'est installé à Bordeaux comme fabricant de filets. Le nom change en 1895 lorsque Anne-Henriette Guignan épouse Emile Larrieu, grand-père du propriétaire actuel, mais l'entreprise vend toujours des filets de pêche et de protection pour le bâtiment, l'industrie et le sport. Les moulins de la famille Barthe, quant à eux, produisent de l'huile à Nyons, dans la Drôme, depuis 1720.

Une grande diversité de secteurs

On retrouve ces PME centenaires dans de nombreux secteurs : l’agroalimentaire (17 %), le BTP (14 %), réparties sur l’ensemble du territoire. Paris, le Rhône et le Nord concentrent 20 % de ces entreprises.

Tour d'horizon de quelques-uns de ces succès :

  • Le porcelainier Revol reste avant-gardiste

La PME, basée à Saint-Uze, dans la Drôme, a fêté ses 250 ans en 2018. Malgré son riche passé, Revol ne se repose pas pour autant sur ses lauriers et continue de se réinventer.

Si le nom de Revol semble peu connu, c’est tout le contraire de l’un de ses produits phares, qui n’est autre que le célèbre gobelet froissé. Ce dernier a été développé au début des années 2000 et a été repris depuis par d’autres entreprises. Plus récemment, en 2018, l’entreprise a revisité son gobelet froissé en le fabriquant avec une céramique recyclée.

Concrètement, Revol récupère ses déchets industriels, qui sont ensuite retransformés en céramique. Ce nouveau produit, baptisé « 100% Recyclay » (« clay » signifiant argile en anglais), utilise un procédé « unique au monde », assure la société. Cette innovation écologique pourrait même donner lieu à d’autres articles de vaisselle dans le futur, en dépit d’un coût de production plus élevé que ses produits traditionnels.Grâce à son savoir-faire reconnu à l’international et, peut-être, à la reprise successive par neuf générations, toutes issues de la famille du fondateur, Revol a su perdurer à travers les époques.

  • Babolat, le Français numéro un mondial au tennis

Si le succès des Français sur les courts de tennis n’est pas assez fréquent pour leurs supporters, hors du court, la bataille des équipementiers est largement remportée par une Française : l’entreprise Babolat. Créée en 1875, l’entreprise lyonnaise domine le marché mondial des raquettes de tennis. Elle peut se targuer de détenir près de 30 % de parts de marché grâce à une présence commerciale dans plus de 160 pays. En équipant 200 joueurs du circuit professionnel, dont l’Espagnol Rafael Nadal, Babolat bénéficie de retombées publicitaires enviables, qui témoignent de la qualité et de la fiabilité de ses produits. Sans oublier ses partenariats avec les tournois du grand chelem, Roland-Garros et Wimbledon...

Initialement, la PME était spécialisée dans les cordages, à base de boyaux naturels, pour les instruments de musique et la charcuterie... A mesure que le tennis apparaît en Europe, elle s’oriente vers les cordages pour les raquettes. Un siècle plus tard, dans les années 1990, Babolat s’est lancée dans la fabrication complète de raquettes de tennis et non plus seulement leurs cordages. Au début des années 2000, l’entreprise se diversifie dans le badminton, très populaire en Chine ou encore le padel.

En quête d’innovation, Babolat se concentre désormais sur les nouvelles technologies, avec des raquettes connectées, munies de capteurs permettant de collecter des données sur les frappes de balles. Avec près de 350 employés, dont une cinquantaine aux États-Unis et une vingtaine en Chine, Babolat a réalisé un chiffre d’affaires de 136 millions d’euros au cours de son exercice 2016-2017.

  • Thuasne, champion de l’exportation médicale

Numéro un européen de la production et la distribution de dispositifs médicaux. Créé en 1847 à Saint-Etienne, le groupe familial est parvenu à s'imposer à l’international grâce à ses efforts continus en R&D, à une croissance organique et à des acquisitions ciblées.

Avec une quinzaine de filiales à l’étranger, notamment en Chine et aux États-Unis, Thuasne réalise 40 % de ses 222 millions d'euros de chiffre d’affaires à l’international. Il faut dire que l’ETI s’est largement développée en dehors de ses frontières avec des ouvertures de filiales ou des acquisitions stratégiques lui permettant de pénétrer des marchés. Pour maintenir sa position de leader en Europe et poursuivre sa croissance, Thuasne mise beaucoup sur la R&D, y consacrant chaque année 3,5 % de ses revenus pour financer ses quatre centres de recherche (situés en Allemagne, aux Etats-Unis, en France et au Royaume-Uni). Ces investissements élevés ont permis au groupe de déposer plus de 100 brevets.

Toujours sur le plan de l’innovation, le groupe a créé le Thuasne Lab, à Lyon, un pole technologique dédié au numérique, afin de développer de nouvelles technologies et se rapprocher de start-up. Autant d’éléments susceptibles de faire naître de nouveaux débouchés.