Magaly Siméon, de cadre dirigeante dans les assurances à entrepreneure débutante de la tech

Ancienne dirigeante dans le secteur de l’assurance, Magaly Siméon a fondé Lily Facilite la Vie, une application dédiée aux salariés qui permet de résoudre les problèmes du quotidien et réduire leur charge mentale. 

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Lilyfacilitelavie

300 000 euros. C’est le chiffre d’affaires que la plateforme Lily Facilite la Vie, une application dédiée aux salariés qui permet de résoudre les problèmes du quotidien, prévoit pour l’année 2022. Il y a quelques années sa créatrice, Magaly Siméon, met les pieds dans le secteur de l’assurance par hasard, sans réelle vocation, après avoir été diplômée d’une école de commerce. Au fil du temps, elle se spécialise dans l’assurance des personnes et des risques associés, ce qui lui permet d’appréhender les évolutions de la société. En parallèle, elle suit des formations ciblées en relations humaines. En 2013, Magaly Siméon entre chez CNP Assurances, au sein duquel elle devient membre du Comex.  

Bpifrance : Vous étiez une figure de l’assurance, quel a été le déclencheur de votre envie d’entreprendre ? 

Magaly Siméon : Un conflit de valeurs a été le déclic, un désengagement face à une prise de conscience concernant le parcours et le profil des femmes dirigeantes. Je n’étais plus en phase avec la vision de l’entreprise, trop politique à mon goût. Malgré les propositions alléchantes, il y avait toujours un décalage entre les offres liées à mon expérience, mes compétences et mes envies. Petit à petit, le networking, les rencontres et certains questionnements m'ont donné envie d'entreprendre. Je me suis faite accompagnée dans cette prise de décision afin de mesurer l’ampleur des risques et de délimiter les enjeux. 

B : Comment avez-vous décidé de lancer Lily Facilite la Vie ? 

M.S. : La plupart du temps, l’idée de créer une entreprise nait de la nécessité de corriger ou compenser une injustice. C’est le cas de Lily Facilite la Vie. Nous avons pour objectif de fournir un réseau de contacts aux personnes qui n’en disposent pas, afin de faciliter leurs démarches. Nous répondons à plusieurs besoins : gérer le harcèlement scolaire, appréhender le stress, trouver une structure d’accueil pour le parent devenu dépendant, etc. Pour analyser le marché sur lequel nous nous apprêtions à nous installer, nous avons mis en place des groupes de discussion sur toute la France pendant 6 mois.  

B : Parlez-nous des débuts de la plateforme.  

M.S. : Je me suis retrouvée seule, 4 mois après avoir embauché une spécialiste de l’accompagnement du vieillissement. Cela n’a pas facile mais son départ n’a pas eu d’impact financier de mon côté, grâce au pacte d’actionnaire que nous avions signé. Par la suite, une responsable des Ventes et un CTO (Chief Technical Officer) sont arrivés, tous deux associés au capital. Avec l’arrivée du nouveau responsable technique, nous avons développé une nouvelle plateforme plus adaptée à notre offre. Bien que renoncer à notre ancien dispositif nous ait fait perdre 100 000 euros de fonds propres, nous ne regrettons pas cette décision. Concernant l’apport, tout s’est fait en fonds propres, avec un capital élevé, 2/3 pour moi et 1/3 pour ma première associée afin de financer les 18 premiers mois d’existence de l’entreprise. Peu de temps après, j’ai sollicité une subvention de Bpifrance puis un financement par la dette via le réseau Entreprendre. 

Coté clientèle, j’ai tout de suite cherché des clients potentiels. Pour les grands comptes, le cycle de décisions est long et il faut compter entre 18 mois et 3 ans pour signer un contrat. En octobre 2021, nous avons signé un dont le premier rendez-vous avait eu lieu en septembre 2018. En parallèle, j’ai développé une activité de conseil (20 jours par an) afin de payer les factures et injecter des fonds dans la plateforme. Cela permet aussi de maintenir un équilibre de vie, s’aérer la tête et proposer l’offre à des prospects potentiels. 

B : Et aujourd’hui ? 

M.S. :  Aujourd’hui, la structure comprend 17 personnes : 1/3 pour les ventes, 1/3 pour le marketing et 1/3 pour la recherche autour du produit. Je me suis formée afin d’appréhender l’écosystème à construire pour générer du lead, de la visibilité et des ventes et acquérir une culture générale métier pour mieux interagir avec mon CTO. Nous avons levé des fonds pour en arriver là, grâce à mon mentor du Réseau Entreprendre. Nous avons décidé de le faire avec une Family Office (familles d’ex-entrepreneurs qui disposent de fonds et qui créent une structure pour investir dans les entreprises), avec un horizon de rentabilité à 7 ans. 500 000 euros ont été levés afin de booster les recrutements. Cette levée offre plus de crédibilité, de visibilité pour se positionner vis-à-vis de l’écosystème et tenir ses engagements. 

B : Que retenez-vous du Réseau Entreprendre ?  

M.S. : Devenir lauréate du Réseau Entreprendre en juin 2020 m’a appris à me défaire de mes anciens réflexes et préjugés. Être challengée par une quinzaine d’entrepreneurs pendant 3-4 mois procure une vraie légitimité et permet de gagner ses galons. J'insiste sur l’importance de se faire accompagner pour se poser les bonnes questions, remettre à plat sa vision stratégique et financière, rechallenger le projet. La communauté d’entrepreneurs partage son expérience avec des conseils pertinents. 

B : Si tout était à refaire, comment procéderiez-vous ? 

M.S. : J’aurais démarré par le parcours Réseau Entreprendre afin de challenger mon projet. Mais je suis très fière d’avoir constitué une équipe de 17 collaborateurs, 100 % en télétravail, et ce, avant la crise. Aujourd’hui, 15 000 membres ont accès à la plateforme et l’on prévoit un chiffre d’affaires de 300 000 euros pour cette année. Être entrepreneur, c’est faire preuve d’agilité et s’adapter en permanence à répondre aux nouveaux besoins ! Il ne faut pas baisser les bras, le tunnel est assez long entre l’excitation du début, et la deuxième phase pour émerger, plus longue que ce que l’on raconte. Tout ce storytelling qui existe autour de l’entrepreneuriat est à challenger. Il faut accepter ce qui se passe, ne pas se décourager trop longtemps. En moyenne, il faut entre 3 et 5 ans pour créer une entreprise.