Micro-algues : en s'alliant avec Suez, Fermentalg accélère dans la capture de CO2

Spécialisée dans l’exploitation bio-industrielle des micro-algues depuis 2009, Fermentalg nourrit de grandes ambitions dans la capture de CO2. Afin de relever ce défi, l’entreprise s’allie au géant Suez dans le cadre d’une co-entreprise.

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Fermentalg

 

« Nous allier à un acteur qui possède une belle vision dans le combat contre le changement climatique va nous aider à déployer nos solutions à grande échelle et à mettre toute la puissance des micro-algues au service de la décarbonation de l'industrie », se réjouit Philippe Lavielle. Le PDG de Fermentalg peut avoir le sourire. Lundi 5 juillet, sa société et le groupe Suez ont officialisé la création d'une joint-venture nommée CarbonWorks qui développe un nouveau standard de photo-bioréacteur industriel. Elle a pour mission d'accélérer le développement et la commercialisation de solutions de capture et de bioconversion du CO2 (Carbon Capture and Utilization ou CCU) par photosynthèse micro-algale. 

Les algues, des ressources riches en Oméga-3, colorants et puits de carbone 

Pour Fermentalg, la capture de CO2 est un axe de développement parallèle mais prometteur. L’entreprise, née en 2009, a d'abord cherché à développer la culture de micro-algues pour l’alimentation humaine et animale. Cette période de fondation a abouti en 2014 à une introduction en bourse (IPO), puis au départ de son fondateur, remplacé par Philippe Lavielle. « Mon mandat était clair, je devais aider à faire passer Fermentalg d'une phase techno-scientifique à une phase industrielle et commerciale », raconte ce dernier.  

À partir de là, Fermentalg s’est concentrée sur le développement de produits à fort potentiel commercial, comme l'huile riche en Oméga-3s à base de micro-algues, DHA Origins, aujourd'hui en pleine croissance, ou encore un colorant alimentaire bleu et stable d'origine algale, destiné notamment au marché très porteur des sodas et boissons énergétiques. Si au démarrage Fermentalg s'est intéressé à la culture de micro-algues pour l’alimentation humaine et animale., l'entreprise se concentre aujourd'hui sur les puits de carbone pour répondre aux enjeux climatiques  

Reste enfin ce troisième axe de développement, réponse directe au défi climatique : les puits de carbone. « Les algues des océans assurent de 50 à 60 % de l’absorption dans le cycle du carbone sur terre », rappelle à juste titre Philippe Lavielle. En 2012, sa société dépose des brevets, avant de dévoiler un prototype de photo-bioréacteur « qui fait sensation ». L'idée est simple (sur le papier) : les micro-algues se nourrissent de CO2 pour croître. Elles le décomposent en oxygène (O2) d'un côté, libéré dans l'air, et en carbone de l'autre, qu'elles stockent. Après la COP21 de Paris, Suez contacte la jeune société. Un accord de collaboration de cinq ans est noué. 

Puits de carbone et « bulles d'air purifié » aux JO 2024 

Ces dernières années, plusieurs démonstrateurs ont été déployés en France. « Nous nous sommes rendus compte à cette occasion qu'ils capturaient aussi des polluants atmosphériques, comme les particules fines et les oxydes d'azote », dévoile Philippe Lavielle. Une deuxième application de « bulles d'air purifié », nommée Combin'Air, a alors vu le jour en parallèle. « Des installations seront déployées lors des Jeux olympiques de Paris, ce sera une formidable vitrine », annonce le PDG de Fermentalg. 

Mais pour l'entreprise basée à Libourne, l'enjeu central sur ce créneau reste le passage à l'échelle industrielle de la capture carbone, la mission confiée à la nouvelle co-entreprise créée avec Suez. « L'aide que Bpifrance nous a apportée dans ce cadre a été considérable, insiste Philippe Lavielle. Je suis fier que la France dispose d'un tel outil d'investissement stratégique ». 

Une approche profondément circulaire 

Avec ses puits de carbone, Fermentalg frappera à la porte des industriels. Notamment en ligne de mire : les méthaniseurs, producteurs d’énergie renouvelable en plein essor mais aussi les grands émetteurs de CO2. A Cestas (Gironde), Fermentalg va justement expérimenter dès 2021 sa technologie sur un site de méthanisation. « Il se dessine autour de ce projet une vraie boucle d’économie circulaire », complète Philippe Lavielle. En convertissant le CO2 issu de la méthanisation de produits agricoles, les micro-algues forment en effet une biomasse valorisable en nutrition humaine et animale, voire un fongicide bio, aujourd'hui testé dans certaines vignes. Les premiers photo-bioréacteurs de grande échelle devraient voir le jour d'ici 2 à 3 ans.