Singapour, porte d’entrée de l’ASEAN

Première économie de l’ASEAN, Singapour est un marché mature mais aussi concurrentiel. Pour autant, ce hub régional constitue, pour Frédéric Rossi, directeur Business France de la zone ASEAN et de la délégation singapourienne, un marché intéressant pour les technologies de pointe, mais aussi une porte d’entrée sur l’ensemble de la zone.

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Première économie de l’ASEAN, Singapour est un marché mature mais aussi concurrentiel. Pour autant, ce hub régional constitue, pour Frédéric Rossi, directeur Business France de la zone ASEAN et de la délégation singapourienne, un marché intéressant pour les technologies de pointe, mais aussi une porte d’entrée sur l’ensemble de la zone.

Quelle est la situation actuelle de Singapour ?

C’est le pays développé de la zone. Avec un PIB par habitant très supérieur à celui de la France (le double même de la France en PPA selon le FMI), le pays se classe parmi les puissances mondiales. Ce petit territoire, qui fait la taille de la petite couronne parisienne, concentre des richesses économiques sur quelques niches industrielles où il est leader.

Quatre secteurs, l’électronique, le raffinage et la pétrochimie, la construction navale et le secteur des biotechs et medtechs, représentent entre 20 à 25 % du PIB du pays. 

 «Singapour est considéré par la Banque mondiale comme la meilleure destination mondiale pour le business depuis 8 ans.»

Ses infrastructures de transports et de communication offrent un environnement performant. Singapour est considéré par la Banque mondiale comme la meilleure destination mondiale pour le business depuis 8 ans. Cela veut dire qu’il est facile d’y enregistrer une société, de recruter, de comprendre la réglementation et la fiscalité. Par ailleurs, depuis 15 ans, le pays a constitué un arsenal juridique pour la protection de la propriété intellectuelle dans l’optique d’attirer les centres de R&D et de développer une économie de la connaissance.
Singapour apparaît comme une tête de pont idéale pour accéder aux marchés de l’ASEAN. La maturité de son marché et l’influence qu’il exerce sur la zone en font un tremplin. Un succès à Singapour, le hub régional, facilite l’entrée dans les autres pays de la zone. Aujourd’hui, 46% des multinationales de plus de 500 M€ de chiffre d’affaires ont leur siège Asie-Pacifique à Singapour.
Son important réseau de transports en fait également un hub logistique. Les groupes de cosmétique internationaux partagent par exemple un entrepôt du port de Singapour qui centralise l’ensemble des produits destinés aux marchés asiatiques, reconfigurés ensuite pour les marchés nationaux.

Sur quels marchés peuvent se positionner les entreprises françaises ?

Pour 2015, cinq priorités d’actions ont été définies par l’équipe de Business France. La première concerne la ville intelligente, connectée, durable, sécurisée. Singapour est une des plateformes les plus performantes au monde en la matière. Le concept de « smart nation » apparaît, d’autant que la taille de la nation singapourienne le permet. Un ministre chapeautant toutes les actions en la matière a été désigné. L’ambition est de devenir le terrain d’expérimentation à grande échelle mondial des technologies. EDF, Véolia, GDF Suez y ont implanté leurs centres de R&D sur la ville et noué des collaborations avec des laboratoires académiques locaux.
Autre axe important pour Singapour : le maintien de sa compétitivité. Pour y parvenir, tout ce qui permet d’améliorer la productivité de l’industrie singapourienne et de diminuer sa consommation de ressources (terres, énergies, travail), comme le déploiement de solutions robotiques et la conception des usines du futur, est encouragé.
Le troisième enjeu est lié au numérique. L’ouverture prochaine du centre d’innovation sur les technologies de police d’Interpol à Singapour en fait un haut lieu de la R&D en cybersécurité. D’autres secteurs du numérique offrent des opportunités : les technologies autour du Big data et de la publicité digitale, mais aussi de l’Internet des objets et des objets connectés. Sur tous ces sujets, la France est pleine de pépites que la French Tech peut mettre en valeur. Des évènements vont être montés à Singapour et au Japon.
Ensuite, vient le domaine de la santé, sous l’angle biotechs et medtechs. Les autres secteurs sont déjà matures et structurés (hub pharmaceutique et de tourisme médical). L’ambition sur ce secteur émergent encore peu structuré est de faire venir des PME françaises pour des partenariats technologiques, cliniques et commerciaux. Singapour, plus accessible que le Japon et la Corée, et plus technologique et protecteur que la Chine et l’Inde, peut être un tremplin idéal pour le reste de la zone et ses presque 4 Mds d’habitants, qui représenteront en 2050 les deux tiers de la classe moyenne mondiale.
Enfin, une dernière priorité touche au secteur agro-alimentaire. Sur les produits laitiers en particulier, marché où des besoins non satisfaits existent, ou encore les ingrédients, le bio et la boulangerie – pâtisserie, Singapour peut servir de base pour structurer une présence sur toute la zone ASEAN.

Comment s’implanter à Singapour, travailler et trouver un partenaire ?

S’implanter et travailler à Singapour est facile et ne nécessite pas de s’associer à un partenaire local, sauf dans un très faible nombre de secteurs. Par contre, pour importer des produits agroalimentaires ou pharmaceutiques, une licence et des agréments sont bien sûr indispensables et généralement obtenus par un partenaire local. En identifier un est aisé. Les acteurs locaux sont connus et structurés dans la plupart des secteurs, qui tous sont ouverts aux acteurs étrangers. La difficulté vient de la concurrence présente sur le marché singapourien. Une approche dans la durée et une grande réactivité sont donc nécessaires. Il faut revenir régulièrement et garder le contact car si le marché est attractif, vous ne serez pas le seul à y avoir pensé !

Quels conseils donnez-vous aux entrepreneurs français qui s’intéressent au marché singapourien ?

En premier lieu, il faut être conscient de l’environnement concurrentiel de Singapour. Dans le même temps, il ne faut pas se laisser tenter par toutes les opportunités. Les occasions peuvent donner le tournis et ne finalement pas aboutir à l’établissement de relations sérieuses. Il ne faut pas jouer tous les lièvres à la fois, mais plutôt se focaliser sur quelques objectifs et les développer avant de passer à l’étape suivante.

 «L’aventure ne sera une réussite qu’au prix d’une bonne préparation.»

Il est conseillé de bien évaluer son business plan au départ sur une période de 3 ans, surtout en termes de coûts. Singapour est une destination très chère. Beaucoup de petites sociétés évaluent mal la dépense que constituent des salariés expatriés et une représentation à l’international, d’autant que les résultats peuvent ne pas être immédiats. L’aventure ne sera une réussite qu’au prix d’une bonne préparation.