L’incubateur “corporate” est à la mode en France

Jadis chasse gardée des centres de R&D des grandes entreprises, l’innovation est de plus en plus le fait des start-up. Résultat, les groupes - dans l'aéronautique, la téléphonie... et même l'agroalimentaire - développent leurs propres incubateurs et accélérateurs pour aider les start-up.

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« C'est un changement dans notre culture », reconnaît Bruno Gutierres, directeur du Bizlab, le tout nouveau bébé d’Airbus. L’avionneur vient en effet de lancer en mars dernier son propre accélérateur, à quelques pas de ses usines d’assemblage, à Toulouse. Une quinzaine de projets extérieurs ont déjà été sélectionnés pour bénéficier d’un accompagnement durant six mois, tels que la mise au point d’un GPS pour aider les pilotes à se repérer sur les pistes, l'utilisation d'une voile - pour économiser du carburant - sur les navires marchands qui transportent les pièces avant l'assemblage, ou encore l'installation de boîtiers connectés sur les accès des avions, pour vérifier à distance la fermeture des portes…

« L'environnement aéronautique est très réglementé, explique Bruno Gutierres. Conséquence, trop peu de start-up émergent. Nous souhaitons donner aux petites entreprises – notamment du numérique – les moyens humains, matériels et financiers de développer leur technologie pour trouver des applications dans l'aéronautique. » L’occasion pour Airbus d'en faciliter à l'avenir la commercialisation. A Toulouse comme ailleurs, puisque l’ambition d’Airbus est de créer un réseau mondial de Bizlab. Le prochain doit ouvrir à Hambourg, en Allemagne, puis un autre sera lancé à Bangalore, en Inde.

« Nous disposions déjà en interne d’un FabLab pour la phase d’incubation, rappelle Bruno Gutierres. Mais ce nouvel accélérateur permet de mêler nos salariés au monde des start-up. Outre la création d’un esprit d’entreprise, ce type de structure présente l’avantage de raccourcir le temps d’expérimentation et d’accélérer la mise sur le marché d’une innovation ».

Orange, Airbus, la SCNF, Total, Renault, EDF, GDF Suez... tous s’y mettent

Airbus est loin d’être un cas isolé. Les incubateurs corporate se multiplient depuis quelques mois en France, avec des initiatives chez Orange, Airbus, la SCNF, Total, Renault, EDF, GDF Suez...

Des structures qui permettent aux grands groupes de conserver, à moindre coût, une longueur d'avance en matière de R&D. Ces grandes entreprises se donnent d'ailleurs la possibilité d’entrer au capital des start-up accompagnées. Orange, l'un des précurseurs, a implanté plusieurs FabLab en France et dans le monde depuis 2013. Le géant des télécom est aussi à l’initiative de la Villa Bonne Nouvelle, à Paris. Inauguré l’année dernière, cet espace de 350m2 associe les équipes d’Orange à des start-up, afin de réfléchir à l’impact du numérique sur le travail.

Plus surprenant, l’industrie agroalimentaire manifeste également son intérêt pour ces structures. A côté de son usine de Montauban, dans le Tarn-et-Garonne, le biscuitier Poult a créé son propre Fab lab, associant numérique et alimentaire. A titre d’exemple, le groupe travaille sur l’impression 3D, pour permettre la personnalisation d’un produit alimentaire à partir de l’envoi d’un simple fichier.
« Nous avons beaucoup à apprendre de ce type de structure et de leur mode de fonctionnement, confirme Laurent Noël, « intrapreuneur » au sein du groupe. Ce travail collaboratif permet de mutualiser les savoir-faire afin d’expérimenter de nouvelles technologies. »