Le Rwanda, terre d’opportunités pour les entrepreneurs français

A l’occasion des Rencontres Économiques de Kigali, capitale rwandaise, les 27 et 28 novembre derniers, Bpifrance s’est entretenu avec Antoine Anfré, l’Ambassadeur de France au Rwanda, pour évoquer les opportunités business dans le pays. 

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Kigali, capitale Rwanda

L'Afrique, un continent dont le potentiel suscite l’intérêt de beaucoup d’entrepreneurs à travers le monde, fait aussi face à des défis de croissance, de financement et de formation. Aujourd’hui, l’économie rwandaise se positionne parmi les plus dynamiques de la région notamment grâce aux différents investissements dans ses infrastructures. Les discussions tenues à Kigali les 27 et 28 novembre autour des opportunités de la zone s’inscrivent dans la reprise des relations diplomatiques et économiques entre la France et le Rwanda. 

Bpifrance : Quel rôle jouent les événements économiques majeurs tels que les Rencontres Économiques de Kigali dans le renforcement des relations bilatérales entre la France et le Rwanda ?  

Antoine Anfré : Les Rencontres Économiques de Kigali sont d’abord l'œuvre d’une équipe, celle du Professeur Jean-Hervé Lorenzi qui a fondé le Cercle des économistes. Il organise chaque début juillet le principal rendez-vous économique et académique européen que sont « les Rencontres Économiques d’Aix-en-Provence ». Ce type d'événement permet à la France de rayonner à l’international ; alors quand le Professeur Lorenzi a décidé d’organiser un rendez-vous économique en Afrique et particulièrement à Kigali, c’est tout naturellement que nous avons soutenu cette démarche.    

Cet événement s’inscrit aussi parfaitement dans la stratégie du Rwanda de devenir une destination pour le tourisme de conférence. Le lieu de ces rencontres, le Kigali Convention Center, est un outil très performant. La capitale rwandaise est aujourd’hui la deuxième ville de conférence d’Afrique derrière le Cap. C'est une formidable réussite compte tenu de l'histoire de ce pays, qui était encore à la fin des années 90 le plus pauvre du monde.   

Les événements comme les Rencontres Économiques de Kigali contribuent également à mettre un coup de projecteur sur la France le temps de la conférence, tout en permettant à des personnalités de découvrir Kigali et le Rwanda. C’est le cas, par exemple, pour notre ancienne ministre Elisabeth Moreno, ou pour des universitaires tels que Christian de Boissieu et Pierre Jacquet.  

B : Quels sont, selon vous, les atouts principaux du Rwanda pour les investisseurs étrangers, notamment français, souhaitant s’implanter dans la région et plus largement en Afrique de l’Est ? Quelles initiatives prises ont été lancées pour favoriser les investissements étrangers ?  

AA : Le marché rwandais est étroit mais le potentiel pour les entreprises est réel. Le Rwanda a réalisé un travail remarquable de mise à niveau de son climat des affaires et avait atteint le 2ème rang en Afrique au classement « Doing Business » de la Banque Mondiale en 2020. Il est en effet très facile de créer sa société au Rwanda et d’obtenir les licences pour démarrer son activité. Mais surtout, au Rwanda, il n’y a pas d’impôts cachés, pas de corruption, pas de harcèlement fiscal. Ici, le business se fait dans les règles de l’art. Le Rwanda, c’est aussi une position géographique idéale, au cœur du continent, entre l’Afrique Centrale et l'Afrique de l’Est et Australe. Ici, nos entreprises voient le marché rwandais comme un moyen de rayonner dans la région. C’est aussi le pays des “POC”, pour Proof of Concept, c’est-à-dire des projets démonstrateurs visant à prouver qu’une technologie, qu’un produit, est adapté au contexte africain. Les entreprises qui réussissent au Rwanda ont toutes les chances de réussir au Kenya, en Ouganda, en Tanzanie et ailleurs sur le continent.  

B : Quels sont les secteurs économiques prioritaires ou les opportunités clés pour les entreprises françaises cherchant à investir et à se développer au Rwanda ?  

AA : Aujourd’hui, il y a un peu plus de 40 entreprises françaises actives au Rwanda. Il y a 2 ans et demi, avant la visite du Président Macron, nous en avions une vingtaine. Cet intérêt des entreprises françaises pour le Rwanda continue de se confirmer et de s’intensifier. Les investissements français se concentrent dans quatre secteurs principaux que sont l’énergie, la construction, le digital et la logistique. Mais il y a d’autres secteurs comme le tourisme, l’agroalimentaire et l’industrie qui peuvent intéresser nos entreprises. Notre objectif est de continuer à présenter les opportunités du marché rwandais aux entreprises françaises comme nous avons pu le faire en juin 2023 à l’occasion du EU-Rwanda Business forum qui a réuni une quarantaine d’entreprises françaises. Je ne peux que les encourager à venir investir dans ce pays qui a tant à offrir. 

“La France a décidé d’être très active sur les projets d’innovation au Rwanda” 

B : Comment le gouvernement français soutient-il ses entreprises souhaitant investir au Rwanda ou en Afrique de l’Est, en termes de financement, de partenariats ou d’assistance ? 

AA : La France dispose de nombreux outils pour soutenir le développement des entreprises françaises au Rwanda et en Afrique de l’Est. Cette région, qui n’est pas celle qui est la plus naturelle pour nos entreprises sur le continent, dispose d’énormément d’atouts et le soutien de l’Etat permet d’ouvrir de nouveaux marchés. Au Rwanda par exemple, nous sommes particulièrement mobilisés dans le domaine de la santé et avons signé un prêt de 10 millions d’euros en 2021 pour l’achat de matériel médical pour les hôpitaux rwandais. 70 % de ces équipements viennent de France, ce qui en fait l’illustration parfaite du partenariat gagnant-gagnant. Mais le soutien de l’Etat peut également s’opérer hors financement. Nous accompagnons les entreprises qui s’intéressent au marché rwandais en leur partageant des contacts, en intervenant auprès des autorités rwandaises et en leur expliquant le contexte particulier de ce pays. Il y a aujourd’hui des entreprises françaises qui ont des projets rentables tout en répondant à un besoin de la population rwandaise. C’est le cas par exemple de Canal + qui a lancé la première chaîne de fiction en kinyarwanda, d’Engie qui développe des solutions d’électricité hors réseau, du groupe Duval qui va construire le premier mall du Rwanda, d’Accor avec le lancement très bientôt du Kivu Queen, un bateau de croisière sur le lac Kivu, et l’ouverture d’un Mövenpick à Kigali, etc... Nos entreprises ont bien compris l’intérêt mais aussi les attentes du Rwanda.  

B : En quoi la coopération entre la France et le Rwanda sur des projets d’innovation, de technologie ou de développement durable pourrait-elle contribuer à l’essor économique de la région ? 

AA : La France a décidé d’être très active sur les projets d’innovation au Rwanda, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le Rwanda a fait du développement des nouvelles technologies une priorité nationale. Deuxièmement, le Rwanda, comme beaucoup d'Etats africains, est un pays jeune avec 65 % de la population qui a moins de 30 ans. L’avenir du monde est dans cette région. Troisièmement, dans un monde globalisé, l’innovation peut désormais venir des quatre coins du monde. Enfin, le Rwanda a décidé, à juste titre, de ne pas se mettre dans la main d’un seul pays et de diversifier ses partenariats. La France a donc tout intérêt à se saisir de ces sujets et à travailler d’égal à égal avec le Rwanda sur la base de partenariats gagnant-gagnant.  

Notre activité au Rwanda se décline à travers les interventions de l’AFD et du Trésor dans les secteurs des drones, de la santé et de la mobilité. Nous sommes également actifs, grâce à Digital Africa, dans l’identification de nouvelles start-ups rwandaises qui pourraient développer les technologies de demain.  

Les nouveaux secteurs d’activité seront créateurs d’emplois dans le futur. Ils permettront l’essor économique du pays et de la région, tout en apportant des services supplémentaires à leurs habitants. Prenons le Mobile Money, formidable invention qui permet de payer ses produits de manière digitale. Aujourd’hui, les opérateurs sont les principaux employeurs du pays et sont présents sur tout le territoire. De fait, il faut encourager nos banques, nos opérateurs téléphoniques et nos startups à s’intéresser à l’Afrique et au Rwanda tout particulièrement, pour imaginer les collaborations du futur.